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Avènement du MPSR : Manif de soutien à la junte militaire

 

Dans la matinée du mardi  25 janvier 2022, des Ouagalais se sont réunis dès 8h de façon spontanée à la place de la Nation. Munis de sifflets, de vuvuzelas, des drapeaux du Burkina Faso, du Mali et de la Russie, les manifestants entendaient apporter leur soutien au Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR).

 

 

 

 Avant même l’annonce de la prise du pouvoir par le MPSR, des Ouagalais avaient envahi dès la matinée du 24 janvier la place de la Nation pour motiver les militaires à aller au bout de leur manœuvre, c’est-à-dire prendre le pouvoir. Chose faite dans la soirée du même jour depuis la sortie du capitaine Sidsoré Kader Ouédraogo à la télévision nationale pour annoncer la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale.

 

Réunis sans être convoqués par une organisation, les soutiens des nouveaux maîtres du pays à l’aide de leurs sifflets et de vuvuzelas se faisaient entendre par les passants  et les occupants des bureaux environnants. Dans le brouhaha causé par les sifflets et les baffles  on pouvait entendre la foule scander le nom du nouvel homme fort du pays : le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba. En plus d’avoir toutes les composantes des  forces de défense et de sécurité derrière lui, comme il a été dit dans le communiqué numéro 1, le président du MPSR a des soutiens inconnus qui ont décidé de prendre d’assaut la place de la Nation. Sont de ceux-là Simon Guilogo qui a fait le constat que  depuis les années 60 jusqu’à nos jours,  le Burkina Faso est absent du concert des Nations du fait de l’oligarchie occidentale. Avec le changement de régime, il nourrit l’espoir de voir les choses changer. « Nos chefs d’Etat ne sont pas libres. Aujourd’hui une nouvelle page s’ouvre au Burkina Faso avec le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration qui vient de naître. Nous,  jeunes burkinabè, sommes prêts à les soutenir et à les accompagner parce que sans nous, ils ne pourront pas réussir la mission », a-t-il dit sous les applaudissements de ses camarades.  Selon celui qui se définit comme un libre penseur, le Pays des hommes intègres vient de vivre une révolution militaro-populaire,  à savoir une révolution des militaires et du peuple. « Ce n’est pas un coup d’Etat comme le font comprendre les médias internationaux ».  Pour ce soutien des bérets rouges,  le Burkina Faso ne doit pas craindre les sanctions de la CEDEAO parce qu’avant son pays, il y a eu le Mali et les populations de ce pays voisin tiennent malgré les sanctions. « La CEDEAO n’est pas la CEDEAO des peuples.  L’exemple du Mali est concret. Cet exemple nous montre qu’elle est là pour défendre les intérêts des Occidentaux.  Nous sommes donc prêts à faire face aux différentes sanctions », a-t-il dit en bombant le torse. Il est convaincu qu’avec ce changement, le Burkina connaîtra un développement à une vitesse de 200%. « Le Mali est allé à 50%, mais nous, nous avons  eu des  leçons à partir de l’expérience de ce pays. Nous savons déjà à l’avance ce que la CEDEAO va nous  infliger comme sanction », a-t-il affirmé rassuré,  avant d’appeler  la jeunesse burkinabè et celle africaine à se donner la main car c’est ensemble qu’elle va faire bouger les lignes.

 

Avant qu’il termine son appel à l’unisson, telle une meute de chiens sur une proie, les jeunes sur les lieux ont pourchassé un individu pour retirer le drapeau français qu’il avait en main. Le fanion, les croquants ne sont pas passés par quatre chemins pour le brûler. Après cet acte, les cris de victoire étaient encore plus forts.  Etait de cette sortie de soutien,  un membre du Mouvement on n’en peut plus. Il s’agit de Mahamadi Ouédraogo, alias Madi de Gounghin. Ce  mouvement, selon Madi, a contribué à éveiller les consciences pendant un certain temps. « Nous sommes restés fermes sur notre position jusqu’à ce que les militaires viennent répondre à l’appel. Ce matin, nous sommes venus soutenir l’armée qui a pris ses responsabilités», a-t-il affirmé.  

 

Son souhait est que les nouveaux maîtres du pays  répondent aux aspirations du peuple. Il s’agit notamment de la résolution de l’insécurité afin  de permettre aux déplacés internes de regagner leurs villages. A cette préoccupation s’ajoute  la lutte contre la corruption qui reste un frein au développement. « Que tous ceux qui ont abusé des deniers publics en répondent devant les juridictions », a-t-il plaidé. Selon lui, leur sortie se justifie par le fait que les militaires ont besoin des OSC pour asseoir leur pouvoir parce que, poursuit-il, une junte qui prend le pouvoir  ne peut pas le gérer seul. « Il faut associer l’ensemble de la classe politique, à savoir les OSC, les partis politiques de tout bord et  les différentes confessions. C’est l’ensemble de ce cocktail qui permettra à la junte d’atteindre ses objectifs», a-t-il suggéré.  

 

Abdoul Karim Bagagnan, dit Lota, membre de la Coalition du 27 novembre,  venu pour la même cause a affirmé qu’ils resteraient sur les lieux le temps nécessaire pour montrer à l’ensemble de l’opinion nationale et internationale que tous les Burkinabè se retrouvent  dans le coup d’Etat. « Nous sommes là pour soutenir le nouveau vent qui souffle au Burkina Faso. Depuis hier, l’ensemble du peuple  burkinabè a décidé de prendre sa liberté. Le peuple a décidé de s’assumer  en libérant le pays des mains de Roch Kaboré ». C’est le même ouf de soulagement qu’a poussé Lovylia Koidima. Elle va jusqu’à imager les évènements ainsi : «  Je me sens comme une femme enceinte qui vient d’accoucher. Je suis actuellement  libérée », a-t-elle affirmé avant de demander aux militaires de rester toujours à l’écoute du peuple.

 

 

 

Akodia Ezékiel Ada

 

Eliette Zoungrana

 

Sidonie Zinkoné

 

 

 

Encadré 1 :

 

Quand les manifestants prennent le drapeau russe pour celui de la France

 

 

 

Après avoir brûlé un drapeau français, les manifestants ont vu quelques minutes après flotté en l’air un fanion ressemblant à celui de la France. Vite ils se sont regroupés autour de l’homme tenant l’étendard. Ces suggestions fusaient de partout : « Brûlez le drapeau. Le tenant du drapeau non plus ne doit pas échapper. Qu’est-ce qu’il fait ici avec une banderole  de la France ? ». Les bouillants ont dû calmer leur ardeur quand ils ont appris que ce n’était pas le bleu, blanc, rouge de l’Hexagone, mais les trois bandes horizontales blanche, bleu et rouge de la Russie, le nouveau partenaire que certains appellent de leurs vœux. Ignorance, quand tu nous tiens !

 

 

 

A.E.A.

 

 

 

Encadré 2 :

 

Réactions de manifestants

 

 

 

François Béogo du Mouvement pour la refondation du Burkina Faso

 

« Nous ne courons pas pour l’argent »

 

« Nous avons été trahis par l’ancienne génération, et nous avons eu la chance d’avoir une nouvelle génération de militaires dignes qui ont décidé de libérer le Burkina Faso. Nous ne sommes pas de ces jeunes qui courent juste pour prendre de l’argent. Nous avons besoin de jeunes qui vont apporter des idées, que ce soit des étudiants, des commerçants, qu’ils nous rejoignent afin qu’on puisse appuyer l’armée. Nous sommes prêts à soutenir nos soldats si réellement ils orientent leur politique vers le bien commun »

 

 

 

Hamadé Ouédraogo, blessé du putsch manqué

 

« On ne déteste pas Roch »

 

« Aujourd’hui, c’est un signal fort pour tous les Burkinabè et pour toute l’Afrique de l’Ouest en général parce que nous sommes à un tournant décisif de notre histoire. La meilleure plume aujourd’hui, c’est l’armée républicaine. Nous invitons toute la population à sortir massivement pour soutenir cette armée-là. Nous ne  détestons pas notre ancien président, mais on a constaté une incapacité dans sa gouvernance. Pour jouir de ses droits, il faut d’abord vivre, cependant chaque Burkinabè s’inquiétait du jour au lendemain. Si la CEDEAO, l’UE, la communauté internationale, l’ONU et la France, les Etats-Unis se lèvent aujourd’hui pour chasser notre armée qui a pris le pouvoir, ils nous trouveront sur leur chemin. Nous condamnons fermement tout décret venant de la CEDEAO, nous condamnons avec la dernière énergie tout ce que la communauté internationale va dire contre notre chère armée. »

 

 

 

Albert Zoungrana, manifestant

 

« Nous mettons en garde la CEDEAO »

 

« Nous sommes en joie, on a eu la paix, l’armée a pris le pouvoir, nous soutenons les forces de défense avec la dernière énergie. Nous mettons en garde la CEDEAO et l’Union Africaine. Ça fait 7 ans que le peuple burkinabè est dans la souffrance, on a crié jour et nuit, on a appelé de gauche à droite, on n’a pas eu quelqu’un pour nous sauver. Aujourd’hui la jeunesse burkinabè a pris la résolution d’appeler l’armée à essuyer ses larmes et elle a répondu. Nous la soutenons jusqu’à ce que la sécurité revienne dans notre pays ».

 

 

 

Victor Dieudonné Windinga, professeur à la retraite

 

« Le pouvoir pensait qu’on voulait manger »

 

« Nous avons tous suivi comment les choses glissaient à un moment. Nous avons apporté notre contribution pour  redresser, mais rien n’y fit. Tout ce qu’on a fait était du vide, ils pensaient peut-être qu’on voulait manger. Pourtant ce n’était pas le cas. Nous bénissons le nom de Dieu qui nous a permis d’être dans cette situation où le pays est libéré. Nous pourrons nous attaquer maintenant aux vrais problèmes, la question de l’insécurité mais aussi la question du développement. »

 

 

 

Emile Demtéogo

 

« Assumons nos responsabilités»

 

« J’aimerais formuler  des recommandations pour le pouvoir actuel. Les nouveaux dirigeants   ont dissous le gouvernement et l’Assemblée nationale, c’est bien, mais il faut qu’ils dissolvent tous les partis politiques actuels afin de pouvoir faire le travail comme il se doit. Si cela n’est pas fait, la France va ressusciter dans les rangs de l’opposition alors que nous ne voulons plus de l’opposition. Actuellement, nous voulons des hommes de vision afin de sortir le Burkina du gouffre. La deuxième recommandation : nous aimerons que le pouvoir en place collabore avec le Mali et la Guinée. Il est clair que si les trois Nations sont unies, les autres n’auront qu’à suivre. Sans union nous sommes faibles et rien n’est possible quand vous êtes faibles. Enfin, il faut rompre les liens avec la France. Nous voulons assumer nos responsabilités et cela quel que soit le prix à payer. »

 

 

 

Adama Tiendrébéogo, dit Colonel, membre de la Coalition du 27 novembre

 

« Colonel avancez… »

 

« Nous sommes très contents parce que l’armée burkinabè a pris ses responsabilités.  C’est ce que nous demandions depuis toujours. Nous allons lutter avec eux. S’il faut aller au front, qu’ils sachent qu’ils pourront compter sur la jeunesse burkinabè. Nous sommes prêts à défendre notre Nation. Roch Marc Christian était incapable de nous défendre contre les terroristes. Quand il appelait le peuple, personne ne répondait à son appel. Nous sommes derrière l’armée aujourd’hui et même demain. Que le colonel Damiba avance car le peuple et l’armée sont derrière lui. »

 

 

 

Abdoul Nassir Kouanda, commerçant

 

« Il ne faudrait pas que le nouveau régime déçoive le peuple »

 

« Nous sommes à la place de la Nation pour soutenir les nouvelles autorités. Nous les invitons à ne pas emboîter le pas à Kaboré, qu’elles fassent rouler le pays sur de bons rails pour que les Burkinabè puissent aboutir à des élections transparentes, libres et équitables. Nous attendons de ce nouveau pouvoir la justice. Nous voulons également qu’il écoute les préoccupations du peuple. Aujourd’hui les gens sont encore sortis pour leur témoigner leur accompagnement. Il ne faudrait pas qu’ils déçoivent ce peuple. »

 

Propos recueillis par :

 

E.Z. & S.Z.

 

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