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Une Lettre pour Laye : Drôle de fidélité à un président déchu

 

Cher Wambi,

 

Tu te rappelles que le procès sur l’assassinat du capitaine Thomas Sankara avait été suspendu le 03 mars 2022 suite à une requête d’inconstitutionnalité introduite par les avocats des accusés Jean Pierre Palm, Tibo Ouédraogo et Bossobè Traoré devant le Conseil constitutionnel au sujet de l’article 313 du code de procédure pénale qui régente la question des atteintes à la sûreté de l’Etat, en clair des coups d’Etat. L’argument était que le coup d’Etat n’est pas une infraction au Burkina Faso puisque la prise du pouvoir par le MPSR (Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration) du lieutenant-colonel n’a pas été sanctionnée par la justice et que la Charte de la Transition ne condamne pas formellement les putschs.

 

 

Dans ma missive du vendredi 11 mars courant, je t’avouais que c’est une patate chaude qui venait d’être refilée ainsi aux Sages. Dans l’attente de la décision, le procès, comme le veut la loi, a été suspendu. Je me demandais comment le Conseil constitutionnel allait trancher cette question qui « peut faire sauter la République ».

 

Je m’étais même jeté à l’eau en prédisant, en ces termes, ce que pourrait être la délibération des Sages : « je ne serai pas étonné que le Conseil constitutionnel déclare la requête recevable dans la forme mais mal fondée dans le fond ».

 

Cher Wambi, il faut bien avouer que j’ai vu juste puisque le 18 mars dernier, le conseil constitutionnel a tranché en déclarant la requête « recevable » mais en affirmant que l’article visé est conforme à la Constitution et qu’en conséquence la requête est rejetée, car « non fondée ».

 

Avec cette décision, le procès Sankara pouvait reprendre. C’est ainsi que, le mardi 22 mars 2022, la salle des Banquets de Ouaga 2000, transformée en prétoire militaire, a repris du service.

 

Place donc aux plaidoiries des avocats de la défense qui ont tout tenté pour sauver leurs clients. Dans leurs argumentaires ils ont abondamment montré la faiblesse de l’accusation dont la matérialité reste à prouver. Pour eux, il y a lieu de déclarer l’extinction de certaines infractions pour cause de prescription. C’est le cas selon eux de l’attentat et de la complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat. Ils estiment qu’au départ, la famille Sankara n’a pas porté plainte pour cette infraction en 1997. Ce n’est que bien après que cette infraction est apparue dans le dossier.

 

C’est aussi le cas du recel de cadavre qui ne figurait pas dans la plainte initiale. Mieux, les avocats soutiennent que cette infraction est arrivée dans le dossier seulement en 2015.

 

Si on doit suivre la défense, il ne reste que l’assassinat. Mais sur ce point, ils ont des choses à redire. Chacun soutient que la procédure n’a pas pu établir formellement que c’est X qui a tiré sur Y. Au contraire, les personnes citées comme étant celles qui ont tiré sur Sankara et ses 12 compagnons ne sont plus de ce monde. On parle de Nabié Nsoni, Otis Ouédraogo et Hyacinthe Kafando qui, lui, est en fuite.

 

Toute la journée d’hier, les avocats du général Gilbert Diendéré ont plaidé sa cause devant les juges. Ils devront poursuivre leurs plaidoiries ce matin. A la fin de leurs plaidoiries, place sera faite à l’Agent judiciaire de l’Etat (AJE) qui se prononcera sur sa qualité de civilement responsable que les différentes parties au procès veulent lui faire porter pour garantir les dédommagements dus. Entre-temps, la parole aura été donnée à chaque accusé pour son dernier mot avant que la chambre ne se retire pour délibérer. C’est dire que nous sommes quasiment à l’épilogue de ce procès historique qui a débuté le 11 octobre 2021.

 

Cher Wambi, comme tout le monde, tu as constaté que la migration saisonnière de la faune politique a commencé.

 

En principe, c’est un phénomène assez régulier que nous observons généralement avant ou après des élections. Les uns en transhumance pour un meilleur positionnement en cas de scrutin de liste, les autres en exode pour voler au secours d’une victoire inéluctable dans le secret espoir d’être récompensés à la hauteur de leur trahison. Et tous les partis, en tout cas ceux qui comptent véritablement sur l’échiquier politique, en ont été soit bénéficiaires soit victimes.

 

Aujourd’hui à la faveur du coup d’Etat du 24 janvier 2022, c’est l’ancien parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), qui fait les frais de cette inconstance en politique.

 

Tout est parti, comme tu l’as sans nul doute appris, d’Abdoulaye Mossé alors responsable des mouvements et associations du MPP et vice-président de l’Assemblée nationale. A sa suite, une quarantaine de personnes ont rendu leur démission. En attendant que d’autres militants, et non des moindres, prennent, eux aussi, le large, selon certaines sources bien introduites qui prédisent la même saignée au sein d’autres partis. L’objectif final étant, m’a-t-on appris, la mise en orbite d’une formation politique transversale.

 

Vrai ou faux ? On en saura davantage dans les semaines ou les mois à venir.

 

A un degré près, ça rappelle le groupe des 75 membres du bureau politique national qui avaient, en janvier 2014, quitté le CDP pour refus de cautionner le projet de modification de l’article 37. Quelque trois semaines plus tard, ils créeront le MPP, cornaqué par Roch Marc Christian Kaboré, Salif Diallo et Simon Compaoré.  

 

Cher cousin, qu’on se le dise : dans le principe, chacun est libre de quitter ou de rester dans un parti. Après tout, on ne mobilise l’homme que sur la base de ses intérêts. Et ils ne sont pas nombreux nos politiciens qui jetteront la première pierre sur Mossé et sa suite.

 

Néanmoins, cher Wambi, reconnaissons qu’il y a quelque chose de vraiment gênant dans cette vague de démissions au regard du contexte et de la précipitation avec laquelle leurs auteurs ont coupé les amarres avec le navire battant pavillon MPP.

 

En effet, moins de deux mois après la perte du pouvoir de celui qu’ils ont vénéré six années durant, alors que ce dernier n’est toujours pas libre de ses mouvements au grand dam de sa famille politique et biologique, voilà que certains de ceux qu’il a biberonnés lui tournent le dos au moment le plus inattendu. La décence aurait quand même voulu, si tant est qu’on peut encore parler de décence chez certains, qu’ils attendent la libération de l’enfant de Tuiré avant de l’enterrer politiquement vivant.

 

Comble de paradoxe, certains démissionnaires se sont même permis de professer leur loyauté et leur fidélité à celui qu’ils abandonnent à son sort. Mais quelle drôle de fidélité !

 

On me dira, cher cousin, qu’ainsi va la politique sous nos tropiques, c’est-à-dire en Afrique. C’est vrai. Mais, cher cousin, ce qui nous est donné de voir actuellement n’honore ni ceux qui décalent plus vite que leurs ombres ni la politique dans notre pays.

 

 

 

Cher Wambi, à présent, je t’invite à feuilleter avec moi le carnet secret de Tipoko l’Intrigante.

 

 

 

- Demain samedi 26 mars à partir de 9 heures à la Maison du retraité Antoine Nanga, le président de l’Union pour le changement et le progrès (UPC), Zéphirin Diabré, sonnera le rassemblement de ses anciens députés, présidents de conseil régional, maires auxquels se joindront les présidents de fédération et secrétaires généraux de section.

 

A l’ordre du jour de cette rencontre, la toute première réunion après le coup d’Etat du 24 janvier : la situation nationale et la vie du parti.  

 

   

 

- La dégradation de la situation sécuritaire dans la région du Centre-Nord prend de nos jours des proportions très inquiétantes. Dans la province du Sanmatenga, les populations hôtes et les personnes déplacées internes (PDI) des villages et du chef-lieu de la commune rurale de Namissiguima semblent avoir obéi à l’ultimatum de 72 heures lancé le 16 mars 2022 par les groupes armés terroristes. Selon des témoignages, beaucoup de localités de Namissiguima se sont vidées de leurs habitants ; les nouvelles personnes déplacées ont trouvé refuge à Nasséré dans la province du Bam, au centre-ville de Kaya et à Basnèré, une bourgade de Kaya. Le chef-lieu de la commune de Barsalogho, qui, en plus de la population hôte, accueillait plus de 100 000 PDI, se vide elle aussi de ses habitants en raison de la dégradation de la situation sécuritaire. La psychose s’est même accentuée aussi bien au sein des populations que chez les employés de l’Etat et du privé depuis l’assassinat sur l’axe Barsalogho-Kaya, le lundi 21 mars dernier, d’un policier en service au commissariat de police de Barsalogho. Selon certaines indiscrétions, la victime, du nom d’Abdallah Barry, aurait été enlevée par des individus armés à quelques encablures du village de Gabou. Les forces du Mal auraient emporté la moto du policier dont la dépouille a été enlevée et transférée dans une morgue de Kaya le mardi 22 mars.    

 

Des mesures urgentes doivent être prises par les nouvelles autorités nationales afin d’éviter que les communes de Namissiguima et Barsalogho ne tombent aux mains des groupes armés terroristes comme celle de Dablo en fin novembre 2021.

 

A noter que Namsiguia, une autre bourgade de la commune de Bourzanga dans la province du Bam, est, selon les informations, sous contrôle des terroristes depuis le 17 mars dernier.

 

 

 

- Comme il a l’habitude de le faire à quelques jours de ramadan, le cheikh Abdoul Hamid Zoungrana tiendra sa grande conférence islamique ce samedi 26 mars 2022 sur le terrain du quartier Bissighin de Ouagadougou à 19h. C’est ce cheikh qui œuvre, comme il le peut, à une saine compréhension de l’islam par ses coreligionnaires et ses concitoyens des autres confessions. Ce sera l’occasion pour le mufti, connu et apprécié pour le langage de vérité qu’il tient, de dispenser des enseignements que les fidèles doivent intégrer pour mieux accueillir ce mois sacré et bénéficier de ses bienfaits au maximum. Au-delà des recommandations liées au 4e pilier de la religion musulmane, ceux et celles qui effectueront le déplacement auront des notions sur la manière de purifier leur cœur de la jalousie et de la haine afin de mener une vie utile ici-bas et de figurer parmi les bienheureux dans l’au-delà.

 

Toujours en prélude au ramadan, l’Association des muezzins Said Bilal du Burkina, elle, a opté pour un séminaire de formation qu’elle donnera à 300 muezzins émanant des différents secteurs de la ville de Ouagadougou ainsi que d’autres cités du pays. Cette activité aura lieu du 29 au 31 mars 2022 au Conseil burkinabè des chargeurs (CBC) à Ouagadougou avec pour thème : « L’apport du muezzin en temps de crise dans son environnement ». La rencontre a été placée sous le parrainage d’El hadj Moussa Kouanda, président de la Communauté musulmane du Burkina Faso (CMBF) et président du présidium de la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB), et le coparrainage d’el hadj Oumarou Zoungrana, président du Mouvement sunnite du Burkina. 

 

 

 

Tipoko l'Intrigante n'apprend rien d'elle-même, elle n'invente jamais rien. Tipoko l'Intrigante est un non-être. Elle n'est ni bonne en elle-même, ni mauvaise en elle-même. Elle fonctionne par intuition, car "l'intuition c'est la faculté qu'a une femme d'être sûre d'une chose sans en avoir la certitude..."

 

 

 

Ainsi va  la vie.

 

Au revoir.

 

 

 

Ton cousin

 

 Passek Taalé

 

Dernière modification ledimanche, 27 mars 2022 21:30

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