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Lutte contre le terrorisme : Les 5 cartouches du lieutenant-colonel Damiba

 

Le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo est donc resté droit dans ses bottes.

 

 

Alors que la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) avait enjoint au Burkina de ramener la durée de sa transition à un délai acceptable, le président du Faso s’est invité vendredi dernier sur la radio-télévision nationale  pour affirmer que le seul délai qui vaille, c’est le recul du terrorisme et la résorption du drame humanitaire que le fléau entraîne. Pas question donc pour lui de se mettre au garde-à-vous et de s’exécuter « sans hésitation ni murmure », comme on dirait dans l’armée, même si le dialogue entre les deux parties est maintenu. La preuve, le président de la commission de la CEDEAO, l’Ivoirien Jean Claude Kassi Brou, a séjourné à Ouagadougou les 1er et 2 avril 2022 pour maintenir le fil du dialogue.

 

 

Sandaogo semble donc s’inscrire à l’école malienne et à celle guinéenne, refusant ce que certains considèrent comme un diktat. En terminant son adresse du vendredi soir par un « Vive la communauté des peuples », il reprend d’ailleurs à son compte la vulgate d’une partie de l’opinion ouest-africaine pour qui la CEDEAO ne serait qu’un simple syndicat de chefs d’Etat. Le hic, c’est qu’en s’inscrivant dans une logique de bras de fer avec le Ghanéen Nana Akufu-Ado et ses homologues, le locataire du palais de Kosyam court le risque de voir s’abattre sur le Burkina une batterie de sanctions commerciales et financières si d’ici le 25 avril prochain un modus vivendi avec la CEDEAO n’est pas trouvé.

 

 

Mais on retiendra surtout de son discours les cinq décisions majeures qu’il a déclinées dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il s’agit de :

 

-       la création de comités locaux de dialogue pour la restauration de la paix ;

 

-       l’interdiction formelle aux populations civiles de résider ou de mener des activités dans certaines zones d’opérations militaires ;

 

-       la restriction des manifestations à caractère politique ou associatif ;

 

-       le démarrage effectif de l’opération d’audits dans l’administration publique et dans les sociétés d’Etat ;

 

-       l’organisation d’une journée de prière pour la paix et la réconciliation.

 

Il était sans doute temps pour le nouveau maître du pays de parler, tant le doute commençait à s’insinuer dans les esprits des Burkinabè au fur et à mesure que les actes terroristes se multipliaient avec leur lot de morts et de personnes déplacées internes. Il n’est pas rare en effet d’entendre certains citoyens affirmer que la soldatesque a fait la force à Roch en prenant prétexte de l’insécurité pour prendre le pouvoir, sans pour autant avoir véritablement les moyens de son éradication. Il faut maintenant espérer que les 5 cartouches du lieutenant-colonel Damiba feront mouche d’ici les cinq mois qu’il a promis pour faire à ses compatriotes le bilan d’étape de son action sécuritaire.

 

 

En attendant, certaines décisions interrogent. Comme la restriction de certaines libertés individuelles et collectives, certes nécessaires en période d’incertitudes comme c’est le cas actuellement. Encore faut-il une explication de texte aux partis politiques, aux OSC et aux syndicats pour que chacun sache ce qui est autorisé ou pas. Il ne manquerait plus en effet que ceux qui accusaient il n’y a pas encore si longtemps que cela le régime Roch de dérives liberticides, voire autocratiques, retombent dans les mêmes travers.

 

 

L’autre sujet qui interroge, c’est l’interdiction de résider ou de mener des activités dans certaines zones d’opérations militaires dont on se demande véritablement comment elle va s’appliquer concrètement sur le terrain, puisque presque toutes les parties du territoire sont concernées. L’Etat va-t-il organiser le déplacement des personnes vers des zones sécurisées ou chaque famille doit-elle s’organiser comme elle peut pour décamper ?

 

 

Et que dire des comités locaux de dialogue, qui ne sont pas en réalité une grande nouveauté ? Déjà en réalité sous le défunt régime, des initiatives analogues avaient été encouragées, fût-ce officieusement, mais, comme toujours, la question se pose de savoir sur quoi dialoguer quand les prétendus jihadistes veulent imposer leur modèle de société et rien d’autre. Et de fait, si être voilée pour les femmes, laisser pousser la barbe et porter des pantalons courts pour les hommes permet de dormir tranquille, certains patelins ont dû accepter cette pax-islamia pour avoir la paix. Ce qui revient de fait à une victoire des terroristes et à une capitulation sans condition d’un Etat qui se veut laïc. Est-ce de ce dialogue que Sandaogo veut ? Celui qui amène l’Etat à renoncer à ses valeurs ? On attend de voir à l’épreuve du terrain.

 

 

 

La Rédaction

 

Dernière modification lelundi, 04 avril 2022 22:00

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