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Rahimo FC en D1 : «Nous privilégions l’intérêt du joueur à celui de l’équipe» (Rahim Ouédraogo, manager général du Rahimo FC)

 

Après une saison de purgatoire en division inférieure, revoilà le Rahimo FC parmi l’élite du football burkinabè. Le championnat de deuxième division de la zone B auquel il a participé au cours de cette saison qui s’achève, n’aura été en réalité qu’une simple formalité pour les pensionnaires du centre de formation Noaga Ouédraogo de Bama. Une compétition qu’ils ont dominée de la tête aux épaules pour ensuite obtenir leur ticket pour la D1 à cinq journées de la fin de la saison.  Ce retour en ligue1 LONAB qui était d’ailleurs beaucoup attendu dans les milieux sportifs burkinabè marquera sans nul doute un nouveau départ pour cette jeune formation dont l’avènement  en 2015 parmi l’élite avait largement contribué à  impulser un dynamisme nouveau dans  le gotha du football burkinabè. Les sang et or de Bama qui entendent cette fois, se doter d’une feuille de route claire à l’image des grands clubs professionnels et avec des perspectives à cours, moyen et long termes caressent également le secret espoir d’accueillir leurs adversaires dans leur antre de Bama. Dans cette interview qu’il nous a accordée, le manager général du Rahimo FC et agent de joueur Rahim Ouédraogo nous parle de la nouvelle configuration de son équipe, de son organisation, de ses infrastructures, de ses ambitions, de la crise à la FBF, etc. Lisez plutôt.       

 

 

 

 

Le Rahimo FC retrouve l’élite du football burkinabè. Un retour à la normale pour vous j’imagine ?

 

 

 

Vous faites bien de le dire. Nous sommes de retour là où nous devrions être, c'est-à-dire parmi l’élite du football burkinabè. Ce qui fait surtout plaisir est que nous n’avons eu besoin que seulement de quelques mois, pour signer notre retour en première division. Et moi je profite de votre micro pour saluer le grand travail abattu par tout le staff de l’équipe. Je pense principalement à l’encadrement technique qui a fait un travail formidable. Je remercie aussi le staff médical, tous ceux qui ont accepté de mettre la main à la pâte durant cette saison et qui ont continué à nous faire confiance. Mes remerciements vont également aux principaux acteurs que sont les joueurs. Je tiens à les féliciter pour cette remontée.  

 

Pour de nombreux observateurs, cette relégation était inattendue pour une équipe qui avait beaucoup impressionné avec ses résultats dès sa montée en D1.  Quelles explications donnez-vous à cela ?

 

 

 

Il est vrai que beaucoup de gens ne s’attendaient pas à une telle contreperformance de notre part ; surtout après avoir représenté le Burkina pendant deux années consécutives en ligue des champions africains. Mais il faudra qu’ils sachent que l’un des principaux objectifs du club est la formation. Nous étions dans cette philosophie de formation et notre plan de travail a été un peu perturbé avec ce titre de champion national que nous avons remporté. Nous étions dans l’obligation de renforcer notre effectif avec des recrues dans l’optique de représenter dignement le Burkina sur l’échiquier continental. Mais le mixage entre les pensionnaires du centre et les recrues n’a malheureusement pas pu apporter les résultats escomptés. Il y a aussi l’encadrement technique qui n’a pas pu mettre en place un système de formation pour une meilleure progression de nos jeunes joueurs. En réalité, on avait voulu expérimenter autre chose en faisant venir un nouvel entraîneur en lieu et place de Bourahima Zongo qui tenait l’équipe depuis des années. Des Portugais y étaient, ensuite Djeffar Lingane, mais la mayonnaise n’a pas pris. On avait aussi introduit le développement musculaire dans la formation des enfants et tout cela a beaucoup joué sur leurs rendements. Le doute avait commencé à s’installer et l’ambiance délétère qui a entouré les élections à la FBF a eu un impact négatif sur notre saison. Je le dis, les équipes qui n’étaient pas avec l’équipe fédérale sortante ont payé le prix fort de leur choix. Nous avons par exemple perdu trois points pour n’avoir pas joué le premier match du championnat. Et c’est ce qui a fait la différence pour nous à la fin du championnat.

 

 

 

Le Rahimo FC en D2. Comment avez-vous vécu cette expérience ?

 

 

 

Nous sommes partis en D2 avec toujours l’option de la formation. Nous avons fait venir un nouvel entraîneur, le gabonais Mougnouma qui a fait un excellent travail.  Il a surtout mené un important travail psychologique en réussissant à convaincre les enfants à accepter cette relégation en D2. Il fallait alors s’adapter aux compétitions de cette division inférieure ; ce qui n’était pas facile au début mais au fil des journées les joueurs ont commencé à prendre du plaisir et les résultats ont suivi.

 

 

 

Vous particulièrement, êtes-vous resté en contact avec la D1 ?

 

 

 

J’ai suivi quelques matchs. Mais peut-être on dira que c’est parce que le Rahimo n’était pas à ce niveau que je parle ainsi. Sinon à mon humble avis, le niveau de jeu n’était pas bon. Les matchs que j’ai regardés ne m’ont pas encouragé à continuer à fréquenter les stades. Je le dis franchement, cette année le niveau du championnat a beaucoup baisser.  Je ne sais pas si c’est la course aux résultats qui a provoqué cette situation, mais à mon avis, le championnat cette année n’est pas attrayant comme l’année passée. Rarement aussi j’ai vu des gens se réjouir de la qualité du spectacle après un match de championnat.

 

 

 

Le Salitas FC  est aussi en difficulté cette année. Faut-il penser à un échec des centres de formation de football au Burkina ?

 

 

 

L’équipe en réalité est en très mauvaise posture. Mais pour nous responsables de centres de formation, ça ne surprend pas. Parce qu’il faut savoir que nous sommes dans une autre philosophie qui consiste plutôt à privilégier l’intérêt du joueur que celui de l’équipe. Nous ne pouvons jamais empêcher un joueur de partir monnayer son talent ailleurs quel que soit son rendement dans l’équipe. On est souvent obligé de sacrifier le résultat de l’équipe pour protéger l’intérêt du joueur qui vient de bénéficier d’un contrat en pleine saison. Ce sont des départs qui handicapent sérieusement le groupe et influent négativement sur les résultats. Le Salitas FC tout comme Rahimo ont connu beaucoup de départs durant le championnat et pour nous c’est toujours un perpétuel recommencement. Lorsque j’ai laissé partir l’année dernière Belem Ouédraogo et Soumaila Ouattara, j’ai été beaucoup critiqué. Alors que je suis sûr que ces mêmes personnes me feraient la guerre si j’empêchais leurs propres progénitures de partir jouer à l’étranger. Mais nous sommes en train de travailler pour avoir la possibilité de remplacer immédiatement les départs par des joueurs de catégories inferieures. Si vous avez remarquez, il y avait un grand écart entre la génération de Frank Lassina Traoré aujourd’hui au Chaktar Donetsk et celle qui devrait prendre la relève. Voilà pourquoi il y a eu cette rupture qui nous a finalement conduit en D2.

 

 

 

La saison prochaine le Rahimo sera de retour en D1. Quelle équipe pour ce nouveau challenge ?

 

 

 

Nous resterons dans la logique de la formation. Le centre existe depuis quelques années et nous avons accumulé une somme d’expérience que nous allons mettre à profit pour consolider les acquis. Nous avons une feuille de route que nous allons appliquer. Nous n’allons pas faire de notre priorité les résultats en championnat. Notre plan de travail consistera surtout à produire du beau football, à produire des joueurs de qualité et espérer compter le plus de joueurs dans les différentes catégories des sélections nationales, et d’autres à l’extérieur. Nous voulons particulièrement garantir  cette année le spectacle au public burkinabè. Pour tout vous dire, c’est une nouvelle génération qui va monter cette année et une autre en préparation avec seulement un écart de deux ans. Comme ça l’équipe pourra puiser à tout moment dans ses réserves pour remplacer ceux qui viendraient à partir.

 

 

 

 Le centre de formation Noaga Ouédraogo de Bama pourrait s’ouvrir cette année au public bobolais pour accueillir des matchs de championnat. L’infrastructure dont vous disposez répond-elle aux normes de la fédération ? 

 

 

 

Vous me donnez ainsi l’occasion de remercier la ligue des Hauts-Bassins et la fédération d’avoir favorablement accueilli l’idée que nous avons émise de jouer nos rencontres à Bama. Leur appréciation nous va droit au cœur parce qu’elle nous permet de valoriser l’énorme investissement que nous avons opéré dans ce centre. Je vous apprends d’abord que le terrain de Bama dispose de la meilleure pelouse au Burkina. Un bon football se joue toujours sur une pelouse de qualité et nous donnons la possibilité à toutes les équipes de venir démontrer leur savoir-faire dans un environnement propice. Ensuite, jouer à Bama permet aussi de décentraliser le football qui est longtemps resté concentré au stade Wobi ou à Sangoulé Lamizana. En jouant à Bama, on s’inscrit dans la dynamique de la décentralisation en transportant le football vers un autre public.  L’idéal aujourd’hui est que chaque équipe puisse disposer de ses propres installations. Et aujourd’hui, il faut encourager l’excellence que de dire qu’en recevant à Bama, le Rahimo sera favorisé.  Nous restons disposé à offrir notre infrastructure à toutes les équipes qui le désirent. Moi personnellement je suis gêné de voir que des matches du championnat se jouent sur des terrains nus et les images diffusées sur la RTB sont suivies partout dans le monde entier. J’ose croire que la ligue et la fédération vont accéder à notre requête et nous permettre de jouer nos rencontres de championnat à domicile.

 

Deux équipes bobolaises, à savoir le RCB et l’ASFB sont en difficulté dans ce championnat. Pensez-vous qu’elles pourront sauver leur saison par le maintien ?

 

 

 

Il ne reste plus que cinq matchs et la situation de ces deux équipes inquiète. Nous allons nous mettre en prière en espérant que les choses iront mieux pour elles. Mais lorsque vous regardez les écarts de points entre les différentes équipes, rien n’est perdu pour l’ASFB et pour le RCB. Je pense que c’est aux dirigeants de continuer à motiver les joueurs et à l’encadrement technique de jeter ses dernières forces dans la bataille. Ils doivent aussi motiver les supporters à venir au stade pour pousser ces équipes à pouvoir remonter la pente. En réalité, on ne souhaite pas voir une équipe de Bobo partir en D2. Mais, la situation de l’ASFB et du RCB doit nous interpeller tous. Il faut que les dirigeants de ces équipes arrivent à tirer tous les enseignements nécessaires et à jeter les bases d’une nouvelle organisation.  

 

 

 

Avez-vous les dernières nouvelles de cet ex-pensionnaire de Bama Frank Lassina Traoré après sa blessure en ligue européenne des champions ?

 

 

 

Il se remet progressivement et les nouvelles sont de plus en plus rassurantes. Il est actuellement en Hollande pour poursuivre sa rééducation. Lassina a encore deux ou trois mois pour revenir sur la pelouse. Je sais que c’est un garçon mentalement très fort. Nous continuerons de prier pour lui en espérant qu’il va rechausser les crampons pour la suite de sa belle carrière. Il y a aussi d’autres joueurs du centre qui sont à l’étranger. Je pense par exemple à Soumaila Ouattara qui était avec les Etalons au Cameroun et qui a eu des prestations honorables. Et ça fait plaisir de voir un pensionnaire de son centre  prester au haut niveau. Belem aussi y était mais il a eu la malchance de contracter une blessure. Lui aussi est en train de se remettre. Rien à dire sur Hervé Koffi qui fait la pluie et le beau temps en Belgique. Il y a aussi Issa Kaboré qui tient bien sa place à Troyes en France. Dans l’ensemble, les nouvelles sont bonnes pour tous les ex-pensionnaires du centre Noaga Ouédraogo.

 

 

 

La Fédération burkinabè de football est actuellement minée par une crise à l’issue incertaine. Vous en tant qu’acteur du football, comment vivez-vous  cette situation ?

 

 

 

C’est dommage et même triste ce qui se passe aujourd’hui à la FBF. Moi personnellement, je n’osais pas imaginer notre structure fédérale dans une telle situation. Mais je dirais simplement que ce que nous vivons aujourd’hui est la suite logique des circonstances dans lesquelles le dernier renouvellement de la structure fédérale s’est déroulé.  Cette élection a plutôt provoqué une grosse fissure dans la famille du football burkinabè. Certains gardent toujours rancune et confondent leur propre intérêt à celui du football burkinabè. Je pense qu’il faudra plutôt commencer à réfléchir sur une réconciliation des acteurs. Cela est très important dans la mesure où des dirigeants sont toujours animés d’un esprit de vengeance et de règlement de compte. Dans le football, il y a ceux qui investissent leur argent, d’autres leur temps et d’autres encore, leur intelligence et leur énergie. Pendant ce temps, d’autres viennent juste, pour se servir du football. Ils ne peuvent pas parler le même langage. On se connaît dans le milieu et chacun sait qui est qui. A Bobo-Dioulasso particulièrement, la fracture qu’il y a entre les acteurs du football est assez profonde. Je pense qu’il est temps de faire table rase de tout cela et accepter de regarder dans la même direction. Il est temps qu’on se retrouve autour d’une même table pour poser les problèmes et chercher ensemble les solutions.

 

 

                  Propos recueillis par Jonas Appolinaire Kaboré

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