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Assassinat journaliste Martinez Zogo : Un séisme d’une grande Amplitude au Cameroun

Dimanche dernier, le corps sans vie portant des traces de sévices et en état de putréfaction du journaliste Martinez Zogo a été retrouvé à une quinzaine de kilomètres de Yaoundé, la capitale politique.

 

 

Depuis l’annonce de la terrible nouvelle, c’est l’émoi dans la famille des médias, surtout au niveau de radio Amplitude, un canal par le truchement duquel l’animateur vedette animait « Embouteillage », une émission fort prisée dans laquelle il abordait des faits de corruption, n’hésitant pas à mettre en cause nommément des personnalités. On disait de son émission que quand elle passait, tout Yaoundé s’arrêtait.

Qu’est-ce qui s’est passé exactement ? Pour le moment, mystère et boule de gomme. Les circonstances de son décès sont encore troubles même si on imagine qu’il y aurait un lien entre son activité professionnelle et son assassinat. Mais de là à pointer tout de suite un doigt accusateur sur l’Etat sans la moindre preuve, c’est un pas qu’il ne faut pas vite franchir. Une chose est sûre : à défaut d’être coupable, l’Etat est responsable, puisqu’il s’agit d’une situation délétère entretenue qui a abouti à ce genre de drame.

 Sitôt l’annonce de la mort du journaliste, par ailleurs DG de ladite radio faite, les autorités camerounaises ont qualifié l’acte de «crime odieux, inqualifiable et inadmissible, et qui ne peut se justifier sous aucun prétexte» et qu’une enquête a été ouverte "pour retrouver et traduire devant la justice" les présumés coupables. Espérons qu’au-delà de ces déclarations, souvent de pure forme et de circonstance, la puissance publique pèsera de tout son poids pour élucider une mort qui rappelle tant d’autres au Cameroun.

 C’est le cas notamment de cet autre  journaliste camerounais anglophone, Samuel Wazizi. Le 2 août 2019, il est arrêté à Buea, en pleine zone de conflit entre séparatistes anglophones et forces de sécurité camerounaises. Il est transféré du 21e bataillon d’infanterie motorisée d’un commissariat de police de Buea vers une installation militaire dans la même ville où il a vraisemblablement subi des violences physiques, puis vers Yaoundé.

Son décès, qui aurait eu lieu le 17 août 2019, a été annoncé par l’autorité le 5 juin 2020, officiellement des suites d’une «infection généralisée» sans que la moindre preuve soit apportée. En ce qui concerne Martinez Zogo, vivement que la justice camerounaise mette un point d’honneur à résoudre l’énigme de cette macabre découverte qui ternit un peu plus l’image du pays où le roi Biya, main de fer dans un gant de velours, règne depuis 1982.

 Cela montre à quel point le métier de journaliste reste jusque-là très dangereux. Pas plus tard qu’en 2022, quatre-vingt-six journalistes et professionnels des médias ont été tués dans le monde en 2022 – soit un tous les quatre jours, selon les données de l’UNESCO, sans compter  les milliers d’autres qui croupissent dans des geôles. Ce qui souligne les risques que continuent de courir les journalistes dans l’exercice de leur profession et leur grande vulnérabilité… Et que dire des nombreuses menaces et autres tentatives d’intimidations  à l’endroit de ceux qui se sont engagés dans ce sacerdoce et à  faire le travail en toute liberté et en toute indépendance ?

A l’annonce  de l’enlèvement, le mardi 17 janvier dernier, de Martinez Zogo, l’on s’attendait à avoir de ses nouvelles au moins vivant, même s’il était retenu quelque part dans un lieu tenu secret. Fort malheureusement ce ne fut pas le cas. Un véritable séisme d’une grande Amplitude dans le paysage médiatique au Cameroun.

 

Issa K. Barry

Dernière modification lemardi, 24 janvier 2023 22:33

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