Guillaume Soro à Niamey : L’ennemi de mon ennemi est mon ami ?
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Il faut croire qu’il était déjà en terre africaine quand, le dimanche 12 novembre 2023, Guillaume Soro annonçait dans une vidéo diffusée sur le réseau social X (anciennement appelé Twitter) son intention de mettre fin à son exil qui a débuté le 23 décembre 2019. Après que l’exilé a passé sept mois en Europe, l’avion le ramenant à Abidjan ce jour-là, avait été contraint d’atterrir à Accra.
Celui qui se voyait succéder à Alassane Ouattara dès l’élection de 2020 a vu ses ambitions présidentielles contrariées pour avoir voulu s’opposer frontalement à son mentor.
Les ennuis politico-judiciaires de l’enfant terrible de Ferké ont en effet commencé quand à la création du RHDP, il s’est affranchi de la tutelle d’ADO en refusant d’adhérer au nouveau parti qui devait réunir tous ses soutiens.
Accusé de s’être offert une villa avec des fonds publics, l’ancien président de l’Assemblée nationale a été condamné une première fois le 28 avril 2020 à 20 ans de prison, 4,5 milliards FCFA d’amende et à la privation de ses droits civiques pendant cinq ans pour «détournement de deniers publics et blanchiment de capitaux».
Le 21 mai 2021, il a été jugé par contumace pour atteinte à la sûreté de l’Etat, «Complot» et «diffusion de fausses informations» et condamné à la prison à perpétuité.
Avec ces multiples condamnations et un mandat d’arrêt international pesant sur sa tête, son retour au bercail était hypothétique et il s’est vu obligé d’errer de pays en pays comme une âme en peine, notamment entre la France, la Belgique et les Emirats arabes unis.
Certes, la nostalgie du pays et les affres de l’éloignement sont pour quelque chose dans l’annonce de l’ex-patron des Forces nouvelles, que beaucoup de gens ont trouvé amaigri et vieilli dans sa vidéo, mais on imagine que financièrement ce devait être également de plus en plus compliqué pour lui de tenir hors du pays.
Restait à savoir si GKS allait revenir directement en Côte d’Ivoire ou s’installer dans un pays proche de sa patrie. On est maintenant situé.
Hier en effet, un communiqué signé de son porte-parole indiquait qu’il se trouvait à Niamey depuis le samedi. Est-ce définitif ? Est-ce une escale avant de continuer dans la capitale économique ivoirienne? On sait seulement qu’il a été reçu en audience par le général Abdourahamane Tchani, le nouvel homme fort du Niger. Qu’est-ce que les deux hommes se sont dit exactement ? Qu’a-t-on promis au président de Générations et peuples solidaires (GPS) ? Pour le moment, c’est mystère et boule de gomme.
Néanmoins, la destination nigérienne interroge. Guillaume Soro débarque en effet alors que les relations ne sont pas au beau fixe entre Niamey et Abidjan.
On le sait, après le coup d’Etat de juillet dernier qui a renversé Mohamed Bazoum, Alassane Ouattara tout comme ses homologues nigérian et béninois constituaient avec d’autres les tenants de la ligne dure de la CEDEAO qui ont poussé à la prise de sanctions politiques, économiques, commerciales et financières particulièrement dures et brandi la menace d’une intervention militaire qui, depuis, semble être retombée comme un soufflé.
On voit mal Tchani dans ces conditions jouer les intermédiaires entre Guillaume Soro et le président ivoirien. De l’autre côté, le locataire du palais de Cocody pourrait voir d’un mauvais œil la présence de son ancien protégé sur les bords du fleuve Niger. Quand on connaît d’ailleurs la capacité de nuisance, même amoindrie, de Soro, on ne peut s’empêcher de voir là une espèce de pacte circonstancié entre lui et le nouvel homme fort de Niamey. Comme on le dit, l’ennemi de mon ennemi est mon ami.
Il faut espérer que pour l’ancien Premier ministre, c’est juste une escale pour pouvoir rentrer définitivement pour participer au processus de réconciliation nationale et faire face courageusement à son destin. Après tout, il est tout aussi comptable qu’Alassane Ouattara, Laurent Gbagbo et feu Henri Konan Bédié de la situation dans laquelle s’est trouvée la Côte d’Ivoire durant ces trois dernières décennies ! Qu’aujourd’hui, ceux qui se sont entendus pour lancer la rébellion qui a conduit au débarquement de Laurent Gbgabo une dizaine d’années plus tard se regardent en chiens de faïence, c’est peut-être quelque part le retour du bâton.
Hugues Richard Sama
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