Loi d’amnistie au Sénégal : Voter ou ne pas voter?
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L’Assemblée nationale sénégalaise a sans doute vécu hier l’une des journées les plus longues de son histoire.
En effet, elle devait examiner le projet de loi d’amnistie voulu par le président Macky Sall pour sortir de l’imbroglio politique qu’il a lui-même créé.
Tout est parti de sa décision, jugée unilatérale par une bonne partie de l’opinion sénégalaise, de reporter l’élection présidentielle qui devait initialement se tenir le 25 février dernier. Mais cette volonté présidentielle sera retoquée par le Conseil constitutionnel qui a estimé que le décret du 3 février fixant la nouvelle date du scrutin au 15 décembre 2024 était contraire à la loi fondamentale.
Du coup, l’enfant de Fatick s’est retrouvé au milieu du gué sans pouvoir faire machine arrière ni avancer. Pour sortir de l’impasse, il a sorti de son chapeau le projet de loi d’amnistie dont l’annonce a été faite au premier jour du dialogue national qu’il convoqué à Diamniadio les 26 et 27 février derniers, lesquelles assises ont proposé la date du 2 juin pour tenir le scrutin présidentiel.
Pour les initiateurs de cette loi, il s’agit d’apaiser le climat sociopolitique et d’aboutir à une élection beaucoup plus inclusive, sauf que pour de nombreux Sénégalais, ce serait une prime à l’impunité dans la mesure où pas moins de 60 personnes ont été tuées dans les différents troubles entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, soit la période visée par le texte.
L’on a assisté hier donc à une véritable querelle de tranchées sur les bancs de l’hémicycle où les deux camps s’affrontaient à coups d’arguments politiques et juridiques. Restait à savoir lequel des deux camps allait rafler la mise à l’issue du vote.
Mathématiquement, voici comment les choses se dessinait: la coalition présidentielle, Benno Bokk Yakaar, pouvait compter sur ses 81 députés et avait besoin de 2 voix de plus pour plier les choses; le PASTEF d’Ousmane Sonko disposait de 24 sièges; le PDS de Karim Wade avait annoncé qu’il s’alignerait sur le vote de la principale coalition d’opposition, Yewwi Askan Wi, et ses 39 élus.
L’issue du vote répondra-t-elle à cette logique mathématique? Jusqu’à hier en début de soirée, il était difficile de savoir de quel côté la balance parlementaire allait pencher.
Mais quel que soit ce qui en sortira, c’est forcément une issue qui ne satisfera pas toutes les parties prenantes. Et au finish, on se demande bien si l’objectif visé, qui est d’apaiser les tensions sociopolitiques, sera atteint.
Une autre question restait en suspens: Macky Sall ayant déclaré qu’à partir du 2 avril, fin de son mandat, il partirait effectivement, la question demeurait de savoir quelle décision prendrait le Conseil constitutionnel sur ce sujet.
Après avoir statuer sur la question le 5 février, les Sages n’ont pas validé la nouvelle date proposée par les dialoguistes sans pour autant préconiser de nouveau calendrier. Ils ont par ailleurs maintenu la liste initiale des 19 candidats à la magistrature suprême. Ce qui signifie que quels que soient les micmacs politiques, Ousmane Sonko et Karim Wade sont définitivement forfaits pour la course à la présidence.
Ce nouveau niet des grands juges sénégalais a poussé Macky Sall à revoir encore ses plans. L'on a appris en effet hier dans la soirée la dissolution du gouvernement et la nomination de Sidiki Kaba, jusque-là ministre de l'Intérieur, à la Primature. Quant à la présidentielle, elle se tiendra finalement le 24 mars prochain. S'il n'y a pas de second tour, le délai constitutionnel peut encore donc être tenu. Mais tout ça pour ça!
Hugues Richard Sama
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