Elections législatives en Afrique du Sud : La chute de la maison ANC
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Les résultats des élections législatives du 29 mai en Afrique du Sud étaient attendus hier 2 juin. Mais à l’heure où nous mettions sous presse, ils n’avaient pas été publiés, même si 99,9% des bulletins de vote avaient été dépouillés. C’est plus que suffisant pour dire qu’alea jacta est pour le parti au pouvoir, l’ANC.
En effet, le parti historique des Albert Lithuli, Govan Mbeki Nelson Mandela, etc., est crédité de seulement 40,22 % des suffrages. Comparés aux 57,59 % des suffrages engrangés aux législatives de 2019, plus qu’un recul, c’est une véritable chute pour l’ANC au pouvoir depuis 30 ans. Il a perdu la majorité absolue et devra donc jouer serré pour faire réélire le président sortant, Cyril Ramaphosa.
Que Nelson Mandela, le père de la nation Arc-en-ciel, a dû se retourner dans sa tombe ! Une nième fois, devrait-on dire, devant ce gâchis du grand capital confiance populaire qu’il a légué à ses successeurs.
C’est vrai que 30 ans aux affaires pour un parti, ça use la sympathie des électeurs, surtout dans un pays post-apartheid comme l’Afrique du Sud, où la fin du pouvoir exclusivement exercé par la minorité blanche avait fait miroiter l’eldorado d’un progrès mieux partagé au bénéfice de la majorité noire.
Là non plus, il n’y eut pas le miracle tant attendu et les espoirs déçus des populations se sont traduits par un vote sanction ce 29 mai. Le déclin de l’ANC, amorcé avec les élections générales de 2019, s’est alors exprimé en une chute de toute la maison, le système d’une domination presque sans partage d’un parti supra-majoritaire. Une défaite historique, amorce d’un tournant tout aussi historique pour l’Afrique du Sud.
Après le pouvoir exclusivement blanc du parti Afrikander des Peter Botha et autres racistes, voici la fin de la domination d’un parti supra-majoritaire qui était censé réparer les fractures sociopolitiques inhérentes à la politique inique du développement séparé des races.
Cette chute de la maison ANC est due à la corruption, à la guerre des ego et au manque d’investissements lourds et structurants porteurs d’une croissance robuste. Il s’en est suivi un chômage persistant et une exacerbation de la criminalité.
Quand s’y ajoutent 2 scissions qui ont fragilisé l’ANC, les résultats des dernières législatives ne sont qu’une demi- surprise.
Cyril Ramaphosa peut cependant être réélu président de l’Afrique du Sud dans un jeu d’alliances avec Julius Malema dont le parti, l’EFF, a recueilli environ 9,50 % des suffrages tout en grapillant les voix de quelques députés indépendants. En tout cas, il va aller à la pêche à 201 voix des 400 députés qui seront appelés à élire le président de la République dans une quinzaine de jours.
Pour l’instant, le grand gagnant de ce scrutin historique est l’inénarrable Jacob Zuma. Son parti, l’Umkhonto We Sizwe (MK)(1), a raflé près de 15% des suffrages. En moins de 10 mois d’existence, c’est une véritable prouesse, même si son fondateur qui traîne mille et une casseroles judiciaires pour fait de corruption et de mœurs fait la fine bouche. Il dénonce des fraudes et demande un recomptage des voix, non sans menaces à peine voilées. Pourtant Jacob Zuma aurait pu être un allié de l’ANC et de Cyril Ramaphosa pour sa réélection. Mais voilà, guerre des ego oblige, il exige la démission du président sortant de la direction de l’ANC avant toute alliance.
Quand on sait que Julius Malema, avec son discours d’extrême gauche, ne séduit pas beaucoup de Sud-Africains, y compris au sein de la direction de l’ANC, Cyril Ramaphosa devra jouer serré pour sa réélection. S’il y parvenait, ce ne serait qu’un colmatage de brèches d’une maison ANC en ruine avancée.
La Rédaction
(1) « Fer de lance de la nation » littéralement traduit du zoulou. Appellation officielle de la branche armée de l’ANC, durant la lutte contre l’apartheid.
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