Mali : Ménaka, poudrière identitaire
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C’est à une véritable boucherie qu’on a assisté en fin de semaine dernière dans la région de Ménaka où, en l’espace de deux jours, une quarantaine de personnes ont été tuées par des assaillants venus d’on ne sait où : à Andéramboukane d’abord le jeudi 26 avril 2018 où on a enregistré, selon les sources, entre six et douze morts ; le vendredi 27 ensuite où trente et une personnes sont restées sur le carreau à Infoukaretane. Et chaque fois, des individus présentés comme «des Peuls à motos» qui seraient membres de l’Etat islamique ont été accusés de cela.
Vrai ou faux, ce portrait-robot ne va certainement pas contribuer à pacifier les relations déjà hostiles entre les communautés dans cette partie du Mali devenue une poudrière identitaire susceptible d’exploser totalement à tout moment et l’on craint d’ores et déjà un embrasement intercommunautaire avec cette stigmatisation des Peuls et des Daoussaks qui ont vécu par le passé ce genre d’affrontements.
Coïncidence du calendrier ou choix de pêcheurs en eau trouble qui se plaisent à dresser les ethnies les unes contre les autres, cette hécatombe intervient en tout cas au moment où se tenaient à Niamey au Niger des pourparlers pour tenter de rasséréner la coexistence entre les différentes communautés de la région de Ménaka. Ils auraient donc voulu détricoter ce délicat raccommodage d’un tissu social particulièrement défait qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement, enfonçant chaque jour un peu plus le pays de Modibo Keita dans l’insécurité endémique.
Mais qu’il s’agisse de ces fameux «Peuls à motos» ou de tous autres hommes sans visage, si rien ne peut justifier un tel carnage perpétré par des vampires ivres de sang, qu’est-ce qui peut bien l’expliquer ? Tout porte en réalité à croire qu’il s’est agi de mesures de rétorsion après les opérations antiterroristes du Groupe d’autodéfense touareg imghad et alliés (GATIA) du sulfureux général Gamou et du Mouvement pour le salut de l’Azawad (MSA) de Moussa Ag Acharadoumane contre les hommes d’Abou Walid al-Saharaoui ; opérations au cours desquelles de nombreuses exécutions sommaires auraient été commises, selon la division des droits de l’homme de la MINUSMA.
La religion d’Ihya Ag Jadi du MSA, qui a pris part aux négociations de Niamey, pour sûr est faite : «On travaille avec Barkhane et on montre les endroits où se cachent les terroristes. C’est pour cela qu’ils viennent tuer nos parents et nos enfants». Le massacre serait donc une vendetta et la rançon de la «traîtrise» dont se rendraient coupables ces deux groupes supplétifs de l’armée malienne soutenus par l’opération Barkhane, qui essaie tant bien que mal de couper les multiples tentacules de la pieuvre qui enserrent le Mali et d’autres pays de la bande sahélo-saharienne tels le Burkina et le Niger. Même si, hélas, ils repoussent à l’image des multiples têtes de l’Hydre de Lerne, aussitôt qu’on les a coupés.
Qui donc sera l’hercule des temps modernes qui viendra à bout de ces narco-djihadistes sans frontières qui imposent à l’humanité une sale guerre sans fin pour d’obscures raisons ? Bien malin qui pourra le dire. En attendant, la conséquence immédiate de ces expéditions punitives est qu’elles pourraient, à l’avenir, refroidir ceux qui seraient tentés de coopérer avec Barkhane, la MINUSMA et les FAMA, notamment dans le précieux travail de renseignement humain sans lequel aucune guerre ne peut être gagnée.
La Rédaction
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