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Sénégal : Quand on vous dit qu'il faut des institutions fortes

 

Pour la première fois depuis mars 2021, une manifestation pacifique d’opposants s’est déroulée à Dakar le samedi 17 février. Elle a été organisée par des partis politiques, avec en première ligne celui des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (PASTEF) d’Ousmane Sonko, appuyés par des OSC de la galaxie anti-Macky Sall.

 

 

 Au même moment, environ 300 prisonniers politiques, majoritairement des manifestants arrêtés il y a 2 ans à 8 mois, étaient élargis. Quand s’y ajoute la déclaration du président Macky Sall, qui a pris acte de l’arrêt du Conseil constitutionnel retoquant le report de l’élection présidentielle au 15 décembre 2024, il y a comme une baisse de la tension sociopolitique dans le pays.

 

 

Pierre Goudiaby Atepa, architecte sénégalais que l’on dit proche de plusieurs chefs d’Etat africains, médiateur désigné par Macky Sall sans tambours ni trompettes, est-il sur le point de réussir sa mission ? Il faut croire que oui. Le tollé de l’opposition et de la société civile militant pour la démocratie, la réprobation officielle ou officieuse de personnalités et d’organisations africaines ou internationales, sans oublier la décision du Conseil constitutionnel du 15 février dernier, ont assurément été pour beaucoup dans cet apaisement qui devrait se renforcer les jours à venir.

 

 

Encore faut-il que le gouvernement Macky Sall fixe rapidement la nouvelle date de l’élection présidentielle car, de toute évidence, la décision de l’organiser dans 10 mois a été rejetée en même temps qu’était affirmée l’inconstitutionnalité de la loi votée le 5 février par l’Assemblée nationale. Du reste, le médiateur Goudiaby Atepa, dans une récente interview, avait avancé le mois de mai prochain, sous réserve que l’opposition tout comme le camp présidentiel se concertent davantage. La première pour recueillir l’avis de sa base, le second pour faire le point des préparatifs matériels avec le gouvernement et la CENI.

 

 

Quoi qu’il en soi, Macky Sall et sa majorité parlementaire devront faire le deuil du bonus de 10 mois dont ils s’étaient auto-gratifiés. Pire, le président sortant doit souffrir, maintenant et dans l’histoire, d’avoir écorné, voire écorché, à brûle-point le modèle démocratique sénégalais. De fait, plus d’un observateur reproche au président sortant d’avoir nourri des velléités de 3e mandat. Elles lui ont fait créer toutes les misères à son opposant le plus en vue, Ousmane Sonko. Contraint de revenir à la raison dans sa déclaration du 3 juillet 2023, il est néanmoins soupçonné d’avoir instrumentalisé des juges pour maintenir ce dernier en prison, invalidé sa candidature et celle de Karim Wade, entre autres, afin de baliser la voie pour l’élection de son dauphin, Amadou Ba. Au demeurant, pour les contempteurs du président sortant, le soudain report de la présidentielle est un coup de Jarnac pour donner plus de temps à Amadou Ba, qui peine à mousser les sondages du vote en sa faveur.

 

 

La décision du Conseil constitutionnel et la mobilisation des Sénégalais feront-elles échec à cette succession parachutée ? La justice, qui a pris le relais de la commission d’enquête parlementaire sur la présumée corruption des membres de la Cours suprême ayant permis l’invalidation de candidatures comme celles d’Ousmane Sonko et de Karim Wade, va-t-elle rectifier ces supposées iniquités, dont la libération de Bassirou Diomaye Faye, retenu pour concourir à la présidentielle mais emprisonné depuis avril 2023 ?

 

 

Voilà autant de questions sans réponses qui n’oblitèrent pas la palpable décrispation de la situation sociopolitique, due assurément au courage des sages du Conseil constitutionnel. Ils ont franchement désavoué le président et sa majorité. Sous nos tropiques, cela est  suffisamment important, pour être relevé, voire mis en relief.

 

 

 En effet, ce conseil constitutionnel est un exemple d’institution fortes opposée aux dérives d’un homme, d’une majorité forte qui n’est pas loin de sauver les lettres de noblesse de la démocratie sénégalaise. Si oui,  dans ce report impromptu de l’élection présidentielle, il y aura eu plus de peur que de mal pour ce modèle démocratique africain.

 

La rédaction          

 

Dernière modification lelundi, 19 février 2024 22:28

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